Caméra de surveillance dans les écoles : pour ou contre ?

Les écoles sont des lieux très sensibles. C’est là que vont nos enfants et nous souhaitons les protéger. Mais sommes-nous prêts à le faire à tout prix ? C’est la question que soulève le débat sur les caméras de surveillance dans les écoles.

Ce que dit la CNIL

La Commission nationale de l’informatique et des libertés autorise la mise en place de caméras de sécurité dans les écoles, mais cela selon des critères bien précis. Si les caméras filment dans les bâtiments, elles ne peuvent enregistrer que les axes de circulation (hall d’entrée…) ou bien les accès (entrées, sorties). Il est formellement interdit aux écoles d’enregistrer les salles de classe ou bien les autres lieux de vie (cour de récréation, préau, toilettes, réfectoire, cantine…) durant les heures pendant lesquelles l’école est ouverte. Elles sont aussi autorisées à enregistrer l’extérieur des bâtiments (abords de l’établissement scolaire, voie publique). Ce sont celles-ci qu’on retrouvera le plus souvent.

En fonction de là où se trouvent les caméras, elles ne répondent pas aux mêmes formalités. Pour une école maternelle ou élémentaire, c’est la commune qui décide de l’installation de systèmes de surveillance. Pour une école du secondaire (collège ou lycée), c’est le directeur de l’établissement, en accord avec le conseil d’administration, qui décide. Les caméras positionnées à l’intérieur ne requièrent aucune demande auprès de la CNIL, tandis que celles qui sont à l’extérieur requièrent une autorisation préfectorale de filmer la voie publique. Dans tous les cas, une caméra devra être annoncée au public à l’aide de panneaux d’avertissement.

Mais un panneau comme celui ci-dessus ne donne pas suffisamment d’information. Il faut en plus que les écoles renseignent la ou les personne(s) responsable(s) du système, la raison légale de la présence des dispositifs (ici, la protection d’un établissement scolaire), les possibilités de réclamation auprès de la CNIL, la durée pendant laquelle sont conservées les images (jamais plus d’un mois) et le rappel du droit à l’image. En revanche, ce panneau conviendra parfaitement si vous souhaitez installer un dispositif de surveillance chez vous.

Mais bien que la vidéosurveillance soit autorisée par la CNIL, celle-ci n’est pas favorable à son utilisation excessive dans les écoles.

Pour ou contre ?

La CNIL n’est pas contre le fait que les écoles souhaitent mieux protéger les jeunes et rassurer les parents. Seulement, elle considère que certaines vont trop loin dans cette optique, jusqu’à devenir de véritables Big Brother. Par exemple, en 2011, elle avait demandé à 5 établissements scolaires de retirer leurs caméras de surveillance, car elle jugée qu’elles ne respectaient pas la vie privée des élèves et du personnel. Thomas Dautieu, responsable des contrôles à la CNIL, s’était alors exprimé dans le Parisien en disant que : « dans un établissement scolaire, la sécurité des élèves doit d’abord être assurée par les surveillants et le personnel éducatif ».

Mais en ce qui concerne les associations de parents et d’enseignants, certaines sont en faveur de leur mise en place, et ce, même dans les classes. En Inde, notamment, les salles de cours sont filmées et la famille peut même accéder à la vidéo à distance pour garder un œil sur l’enfant. Serait-il possible de voir ce système implémenté en France un jour ?

La principale fonction d’un dispositif de surveillance dans les écoles est de protéger les enfants. C’est pour cela que ceux qui sont en faveur parlent plus de « vidéoprotection » et de « vidéoprotéger » que de « vidéosurveillance » et de « surveiller ». Dans cette fonction, les caméras sont capables de dissuader les intrus de pénétrer. Cela a considérablement réduit les risques d’agression au sein de certains bahuts. Les enfants, mais aussi les professeurs et les membres du personnel, sont plus en sécurité.

Les locaux bénéficient, aux aussi, d’une meilleure protection. C’est souvent davantage le cas pour les collèges ou lycées. Certains parmi eux souffrent d’actes de vandalisme réguliers. Graffiti, vitres brisées, destruction de matériel. En installant des caméras de vidéoprotection, ces établissements scolaires ont considérablement réduit la fréquence de ces actes ou les ont même éradiqués. Et des locaux plus sûrs et en meilleur été offrent de meilleures conditions d’apprentissage et de travail.

D’autres actes répréhensibles peuvent être empêchés avec la vidéoprotection. Par exemple, les trafics de produits illicites autour et parfois même devant des collèges et lycées (tabac, cannabis). Les risques d’actes terroristes sont aussi largement réduits.

Mais tout cela est possible en ne s’équipant que de caméras de vidéoprotection aux abords des bâtiments. Elles offrent suffisamment de protection et de force de dissuasion dans ces situations. En effet, si les malfaiteurs renoncent à entrer dans l’établissement, filmer l’intérieur n’a pas d’intérêt.

Mais voici un autre problème : qu’en est-il lorsque les risques sont déjà au sein de l’école ou bien qu’elles parviennent quand même à y pénétrer ? Il était question de produits illicites plus tôt, ces derniers sont parfois consommés par les jeunes dans l’établissement. Cela se fait dans des recoins ou des zones peu fréquentées qui sont donc mal voire pas surveiller par le personnel de l’école. Des caméras de vidéoprotection permettraient d’y mettre un terme. De plus, dans les cas d’actes malveillants sur un enfant dans l’école (brimades…), leur risque est considérablement réduit.

Si on parle plus en détail des caméras positionnées dans les salles de classe, ce sont celles-ci qui s’apparenteraient le plus à Big Brother, à épier nos moindres faits et gestes jusqu’à notre lieu de travail ou d’éducation. Cela pourrait provoquer un très fort sentiment anxiogène chez les élèves et leurs professeurs, augmentant les risques de troubles (stress…). Mais les caméras pourraient aussi rehausser le niveau des jeunes plus en difficultés. Comme ils connaîtraient leur s, ils seraient incités à mieux travailler, à se concentrer plus sur leur travail et à moins somnoler. Ils amélioreraient aussi leur comportement social en évitant les actes malveillants à l’encontre des autres élèves ou bien de leurs enseignants (mauvais langage, brimades…). Une fois ces habitudes prises, il lui paraîtrait naturel de les appliquer aussi en dehors de l’établissement scolaire. Cela réduit par la même occasion considérablement les risques que l’enfant tombe dans la délinquance ou la radicalisation.

Un des inconvénients principaux à l’implémentation de la vidéosurveillance est que cela a un fort coût, décuplé s’il s’agit de leur implémentation au niveau national. Équiper une école d’un kit complet revient à 10 000€ ou 20 000€ selon les configurations. Beaucoup d’écoles n’ont pas les moyens pour s’offrir cela. Cependant, il faut savoir que les mairies, et parfois l’État, financent leur installation. Ce qui a permis à beaucoup d’écoles de s’en équiper. De plus, le coût est justifié s’il permet d’éviter tout incident grave aux élèves ou aux professeurs. Il l’est encore plus si d’autres frais peuvent être réduits voire effacer grâce aux caméras, tels que des frais de réparation après des saccages ou encore de remplacement de matériel.

Et qu’en est-il du personnel de l’école ? On pourrait très bien en arriver à remplacer les surveillants, dont la fonction principale est de veiller sur les enfants, par la vidéosurveillance. Cela entraînerait alors un grand nombre de licenciements et une forte réduction du personnel. Mais une seule caméra de vidéoprotection est souvent plus apte à mieux veiller sur un grand groupe d’élèves. Son champ de vision est plus large que celui d’une personne. Mais les personnes contre leur implémentation au sein des écoles disent que c’est une solution de facilité, un moyen de déresponsabiliser les adultes dont le travail est de veiller au bien-être des élèves.

Mais peu importe tous les arguments qui peuvent être donnés en leur faveur, l’installation de la vidéosurveillance au sein des établissements scolaires entre en conflit avec nos droits et libertés. Comme disait Thomas Dautieu dans la même déclaration qu’il a faite au Parisien : « Un tel système constitue « une collecte excessive de données qui porte atteinte aux libertés des élèves et personnels ». Les établissements s’apparenteraient plus à des prisons qu’à des écoles. Dès lors qu’il y a surveillance, il y a manque de libertés. Les élèves ne pourraient pas s’exprimer librement dans leurs écoles, ce qui entre en conflit avec le droit humain fondamental à la liberté d’expression. Et cette seule raison est suffisante pour mettre un terme au débat.